« L’île Maurice est le refuge du voyageur de passage entre l’Est et l’Ouest. Beaucoup d’entre eux sont des visiteurs de talent et j’ai plaisir à les recevoir sans distinction. » Ces mots prononcés il y a 200 ans par Charles Telfair décrivent parfaitement le plaisir que nous avons éprouvé à recevoir chacun de nos invités du 7 au 10 mai derniers à Bel-Ombre.
Les recevoir en terre mauricienne d’abord, les recevoir ensuite sur ce domaine de Bel Ombre, lieu magique protégé des turpitudes du monde, lieu sauvage, entre mer et montagne, trait d’union entre hier et demain. Sur cette terre mauricienne, nous avons construit des ponts avec l’Europe, l’Afrique, et l’Asie. Des échanges qui, au fil des siècles, nous ont forgé une personnalité particulière avec une destinée particulière.
Nous, Mauriciens, avons entretenu des liens durables avec nos origines. Avec les siècles, il apparaît même qu’il s’agit là de notre vocation première, de notre destin, qui est de réunir ce qui est épars. Mélange de cultures venues des quatre coins du monde et qui ont donné naissance à quelque chose d’unique : des hommes et des femmes qui aiment demain et qui ne cessent de surprendre par l’intérêt qu’ils portent au bien-être des autres. Des Mauriciens se dégagent un humanisme, une empathie et une authenticité privilégiant la qualité du moment présent.
Ce n’est pas pour rien que l’île Maurice et ses habitants ont acquis la réputation d’un savoir-vivre affirmé, tout en cultivant une curiosité des autres. Nous sommes intégrés depuis toujours au reste du monde, et sommes restés résolument ouverts à toutes ses influences. Nous l’avons été bien avant que l’on parle de monde globalisé et du rétrécissement de notre planète.
Il y a des balises qui marquent la vie des hommes et celle des pays. Quelques événements survenus au cours de notre jeune histoire nous rappellent la particularité de notre île. Nous fêtons cette année les 300 ans de l’arrivée des Français dans l’île. Cinquante ans plus tard, soit en 1765, le Domaine de Bel-Ombre émergea comme un lieu fort de la vie sociale et économique de l’île. De 1816 à 1833, Charles Telfair, médecin, botaniste et humaniste précurseur, fut secrétaire de la colonie sous le gouverneur Robert Farquhar. Il fut le curateur du premier jardin botanique, celui de Pamplemousses.
C’est sur le Domaine de Bel Ombre que Charles Telfair avait établi sa demeure principale avec son épouse Annabella Chamberlain. Deux ans après sa mort, un visiteur connu du monde entier vint découvrir la terre mauricienne. Il s’appelait Charles Darwin, et devait devenir le père de la théorie de l’évolution. Il n’avait que vingt-deux ans lorsqu’il débarqua sur notre île en 1835 et il en fut impressionné. D’abord par notre bilinguisme. Dans ses carnets, il note que notre île est sans doute plus francophone que Calais et Boulogne. Il trouva que nos paysages avaient une « parfaite élégance ». Il s’étonna de la grande propreté de Port-Louis et décrivit avec minutie la vie des Portlouisiens. Il nous quitta avec des carnets de notes bien remplis.
Nous voici donc dans le XIXe siècle avec Darwin. Notre entrée dans le XXe siècle sera tout aussi symboliquement puissante. C’est une icône mondiale, un homme de l’universel qui nous y emmène. En provenance de l’Afrique du Sud et en route vers l’Inde, Mohandas Karamchand Gandhi, qui allait devenir le Mahatma, posa le pied sur notre terre en novembre 1901. Après quinze jours passés à rencontrer les Mauriciens, de même que les autorités britanniques, il s’adressa a la population. Son message : croyez en l’éducation et restez unis, c’est là votre avenir. Un message qui trouve toujours le même écho plus de 100 ans après. Nous étions ainsi entrés dans le XXe siècle.
Quatre-vingt-dix-neuf ans plus tard, un autre visiteur à la symbolique tout aussi puissante et universelle posait le pied en terre mauricienne. Il s’appelait Nelson Mandela. Il venait nous rappeler que nous faisions partie de la fraternité africaine et que, sans solidarité nationale, aucun peuple ne pouvait construire son avenir. Nous étions ainsi entrés dans le XXIe siècle.
Darwin, Gandhi, Mandela. Trois géants universels pour une si petite île. Quels meilleurs auspices pour un pays qui se construit…
La sucrerie du Domaine de Bel Ombre serait parmi les trois à avoir été établies en 1765 durant la période française. Le domaine et ses occupants ont connu depuis d’innombrables changements. En 1971, le groupe Rogers, alors dirigé par Amédée Maingard, acquit la majorité des parts dans la Compagnie Sucrière de Bel Ombre. En 1999, l’usine sucrière devenue non rentable cessa ses opérations. De 2001 à 2011, la gestion de la compagnie fut confiée au groupe ENL. C’est sous le leadership de son CEO, Hector Espitalier-Noël, qu’une alternative à l’activité uniquement agricole prit forme. En effet c’est sous l’impulsion du groupe ENL, et du ministre du Tourisme d’alors, Nando Bodha, que les perspectives d’un développement offrant à la population du sud-ouest un nouvel avenir vit le jour.
« C’est bien la première fois dans l’histoire de notre pays qu’un événement nous offre une visibilité de cette envergure. Ce n’est pas uniquement l’histoire du golf que nous avons écrite, mais aussi celle de notre pays. »
Si le domaine agricole de Bel-Ombre fête cette année ses 250 ans d’existence, sa conversion en un vaste domaine de loisirs s’est matérialisée il y a seulement dix ans. C’est désormais plus de 3 000 personnes qui y travaillent. Soutenu par 150 propriétaires de villas, et quelque 30 000 visiteurs chaque année, Heritage s’est installé de manière durable comme un lieu de détente unique dans l’île. Outre la dizaine de milliards de roupies d’investissements consentis, les entreprises opérant dans la région soutiennent la qualité de vie de ceux qui y travaillent et génèrent un flux grandissant de devises pour notre pays.
Avec en toile de fond la riche histoire de notre pays, et de Bel-Ombre, la présence de nos invités a aussi été une première et s’inscrit dans la lignée de notre devise nationale qui est d’être « L’Etoile et la Clé de la Mer des Indes ».
Après seulement dix ans d’existence dans le monde du tourisme golfique et du sport, Bel Ombre continue à suivre un des chemins de sa destinée : rassembler ce qui doit l’être. En effet, pour la première fois, les circuits professionnels d’Europe, d’Afrique australe, et d’Asie se sont rencontrés en un même lieu. Voilà Maurice avec une légitimité parfaite de nouveau pays-pont. Et si j’en juge par la grande amitié qui a plané sur ces rencontres, nous avons eu raison d’innover en organisant ce tournoi tri-sanctionné. Les tournois internationaux sont délimités en zones et c’est la première fois dans l’histoire du golf que trois circuits majeurs se sont rencontrés pour disputer un tournoi. Une seule compétition réunissant trois tours : l’European Tour, le Sunshine Tour et l’Asian Tour.
Pour cette rencontre golfique, c’est toute une partie des forces vives du secteur privé et du public que nous avons réunie : AfrAsia Bank, co-organisateur de l’événement avec le groupe Rogers, Heritage Resorts et ses équipes, qui ont réalisé un sans-faute, l’Office du Tourisme mauricien, la fédération nationale de golf, la Compagnie Sucrière de Bel-Ombre, la compagnie nationale Air Mauritius, Anahita, Villas Valriche, le groupe Land Rover-Jaguar, ainsi que tous les sponsors qui ont saisi l’occasion pour s’associer à cet événement majeur pour notre pays. Ces forces se sont fédérées pour rendre possible cette manifestation sans précédent, à l’impact à la fois national et international.
Les médias présents, venant des quatre coins du monde, ont saisi l’importance de cet événement et sa symbolique, qui dépasse de loin un tournoi de golf. Une quarantaine de sociétés de télévision à travers le monde ont retransmis ce tournoi à quelque 265 millions de foyers. C’est bien la première fois dans l’histoire de notre pays qu’un événement nous offre une visibilité de cette envergure. Ce n’est pas uniquement l’histoire du golf que nous avons écrite, mais aussi celle de notre pays.
Depuis la route des épices, nous sommes un carrefour et un mélange vivant de passé et d’avenir. Les navigateurs décrivent, dès cette époque, l’île comme une terre d’accueil d’exception. Une petite île au Grand Cœur, qui a construit son chemin avec cet esprit d’ouverture et de progrès, permettant ainsi à tous ceux qui y habitent et la côtoient de voir demain avec confiance.
Philippe Espitalier-Noël
Chief Executive Officer
Rogers & Co. Ltd