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Bel Ombre : une transition socio-économique en marche dans la région

L’économie du pays est en transition, avec la restructuration de ses piliers traditionnels, dont l’industrie sucrière fait partie. Cette mutation a entraîné une augmentation du chômage et de la pauvreté, que les secteurs public et privé espèrent combattre grâce au tourisme et l’Integrated Resort Scheme (IRS). Zoom sur la Compagnie Sucrière de Bel Ombre (CSBO) et l’impact socio-économique de ses nouvelles activités sur la région.

Photos. Sophie Montocchio

Jusqu’en 1999, les  principales activités de la région de Bel Ombre sont la culture et le raffinage du sucre, à travers la Compagnie Sucrière de Bel Ombre (CSBO). En juin 1999, la compagnie stoppe ses activités de raffinage et commence à envoyer la canne produite vers trois usines en dehors de la région. Pour CSBO, le moment est venu de réorienter ses activités vers des secteurs plus prometteurs comme le tourisme, les loisirs et le développement immobilier. 

En 2003, un premier projet touristique est lancé, qui comprend la construction d’hôtels, d’un golf et la création de villas IRS (Integrated Resort Scheme). En 2006, trois hôtels (Heritage Le Telfair, Heritage Awali et Mövenpick) et le golf du Château sont inaugurés, tandis que d’autres sites sont identifiés pour de futurs développements. 

En changeant de modèle économique, CSBO bouscule la vie de la population, jusque-là rythmée par les activités de l’industrie sucrière. Au cours des dix dernières années, une transition socio-économique est en marche, non sans défis pour les habitants et les acteurs économiques de la région, qui s’investissent pour faciliter cette transformation.

Bel Ombre Foundation for Empowerment

Il faut savoir que la loi qui régit le développement des villas IRS prévoit une contribution de Rs 200 000 par villa vendue, dans le but d’encourager le développement du pays et des zones dans lesquelles elles sont implantées. C’est ainsi qu’en novembre 2006, la Compagnie Sucrière de Bel Ombre demande au sociologue Malenn Oodiah une étude sur l’impact du développement qui s’opère dans la région de Bel Ombre depuis 1999 : le passage d’une économie primaire à une économie tertiaire. 

L’étude conduite vise alors à définir le profil socio-économique et culturel des habitants de la région, ainsi que leurs conditions de vie, leurs besoins et leur intégration sociale dans le contexte particulier de la région. Il en ressort que les habitants de la région sont peu équipés pour bénéficier pleinement des opportunités créées autour d’eux : avec un taux d’alphabétisation faible et un taux de chômage élevé, l’exclusion est bien réelle. La transition de l’économie locale de l’agriculture au tourisme exige donc un changement de style de vie, mais aussi le développement de nouvelles aptitudes et compétences.

Naissance de la BOFE

Le Bel Ombre Social Development Plan (BOSDP) incite ainsi les acteurs économiques de la région à accompagner la population dans son adaptation à cette nouvelle culture et à ce nouveau mode de vie, à travers quatre principes clefs : le développement intégré, le développement durable, l’intégration sociale et le développement social. Dans ce sens, La Bel Ombre Foundation for Empowerment (BOFE) est créée en 2008, pour soutenir la communauté locale de Bel Ombre.

La région-cible de la BOFE englobe les villages de Baie du Cap, Saint Martin, Bel Ombre et Rivière des Galets. La fondation a une vision à long terme qui dépasse des contributions obligatoires selon les régulations du programme IRS. La vision de l’entité est de créer un véritable élan pour emmener la région et ses habitants au-delà du simple développement économique. 

Éducation, formation et intégration sociale

De nombreuses actions ont été menées par la BOFE, comme en témoigne le rapport d’activités de la fondation entre 2008 et 2011. Dans le secteur de l’éducation, la fondation a soutenu la crèche de Baie du Cap, a contribué à la mise en place de la Maison Familiale Rurale (MFR) de Savanne et a financé des bourses scolaires, entre autres.

Du côté de la formation, la fondation a offert, en partenariat avec Caritas, le programme Life Skills Management, mais aussi un programme d’alphabétisation, des formations visant à améliorer la qualité du service délivré par les  taxis de la région et un service de table d’hôte grâce aux talents culinaires de six cuisinières identifiées et formées par la BOFE,  à travers le cours d’ESTM.

En ce qui concerne l’intégration sociale, un service d’écoute a été mis en place à la fondation, plusieurs événements organisés par la BOFE ont visé à encourager les habitants à prendre leur santé en main, une école de cyclisme pour les enfants a vu le jour à Bel Ombre, des camps de vacances ont été organisés, le conservatoire François Mitterrand y a proposé des cours de musique.

Rogers Foundation reprend le flambeau

Depuis 2016, c’est la Rogers Foundation qui a repris le flambeau sous la houlette d’Audrey d’Hotman de Villiers-Desjardins, CSR & Sustainability Manager de Rogers. « La région et ses habitants ont du potentiel, mais cette transition va prendre du temps car on ne passe pas d’une vie tournant autour des activités de l’usine au tourisme, du jour au lendemain », explique-t-elle. Ce potentiel, la fondation compte bien le faire et le voir fleurir, en continuant le travail de la BOFE et en prenant de nouvelles initiatives. 

Récemment, les services d’écoute et de développement de Caritas-SEED Caritas ont ouvert un nouveau centre d’éveil à Bel Ombre, avec la coopération d’acteurs de la région, dont Heritage Villas Valriche qui a financé les coûts d’opération. En mai dernier, Heritage Villas Valriche a également organisé un forum des métiers, avec les partenaires économiques de la région, pour favoriser le développement socio-économique et professionnel des habitants de la région de Bel Ombre. 

D’autres initiatives sont à noter : le projet Lovebridge, qui lutte contre l’extrême pauvreté à Maurice, a été implémenté dans des familles pour accompagner leur intégration sociale sur le long terme ; les camps de vacances, initiés par la BOFE, sont toujours organisés pour les enfants ; une équipe de rugby a vu le jour avec le soutien de la Rogers Foundation ; des formations ont été organisées à l’attention des femmes de la région, avec à la clé un emploi de Villa Attendant.

Un nouveau rapport commandité

Un nouveau rapport, délivré en 2017, indique que depuis le déploiement immobilier de Heritage Bel Ombre, la région a bénéficié – à différents degrés – de développements infrastructurels et socio-économiques. Cependant, le Relative Development Index (RDI) montre que Baie du Cap, Bel Ombre et Rivière des Galets sont à la traîne par rapport à d’autres régions de Maurice.

Si la population reconnaît l’impact positif de ce développement, elle fait part de déceptions par rapport au recrutement de travailleurs venant de régions avoisinantes, surtout au début de la transition. À l’heure actuelle, la situation a évolué et environ 17,7% de la population active de la région de Bel Ombre sont employés par différents opérateurs économiques.

Les défis liés à la pauvreté ont encore un impact sur les familles de Baie du Cap, Bel Ombre, St Martin et Rivière des Galets. Le principal cheval de bataille est le chômage, et la formation des chômeurs reste un défi majeur car de nombreux participants abandonnent les cours. Malgré tout, il existe des exemples de réussite entrepreneuriale dans la région, témoignant du potentiel de la population. 

Répondre aux besoins actuels de la population 

Grâce à ces nouvelles données, le Bel Ombre Social Developement Plan peut être réajusté pour répondre aux besoins actuels de la population. Il est prévu de nommer un Social Implementer, chargé de défendre les nouvelles stratégies de développement social, en collaborant étroitement avec la population locale et les autres parties prenantes. 

Responsabiliser les habitants est une autre priorité afin qu’ils se rendent compte de leur capacité à faire avancer les choses. Ainsi, la mise en place d’une stratégie de développement communautaire donne plus de poids aux dirigeants qui peuvent ensuite agir en faveur de leurs semblables. Le besoin principal de la population locale étant l’emploi, la formation, le coaching et le soutien social sont indispensables. L’encadrement par leur supérieur hiérarchique sur le lieu de travail peut aider à lutter contre les abandons de poste. L’entreprenariat peut être également encouragé, fondé sur l’analyse des besoins et talents locaux. 

Tony Wong Ah Sui, directeur du Keats College, Chemin Grenier

« Enfant du Sud, je suis actif dans le domaine éducatif depuis les années 90. Le développement touristique de Bel Ombre aura un impact sur la population mais cela va prendre du temps. Plusieurs facteurs ralentissent ce développement économique et social, notamment le manque de qualification des habitants, le manque d’infrastructures mais aussi la situation familiale de certains foyers dans laquelle les enfants sont enfermés. Les hôtels ont un rôle à jouer, en collaboration avec les acteurs de la région, comme les écoles qui ont une influence auprès des jeunes. »

Tony Wong Ah Sui

Marilyn Monroe, propriétaire de La Roche Cari, Bel Ombre

« J’ai commencé par ouvrir un stand de mines et boulettes sur la Route Royale de Bel Ombre en 2005. Quelques années plus tard, j’ai décroché un contrat de cuisine pour l’équipage d’Air France qui séjournait au Mövenpick. Cette opportunité m’a permis d’économiser de l’argent et de construire mon restaurant. Il m’arrive aussi de cuisiner pour Heritage Villas Valriche. Mais dans le village, il n’y a pas assez d’activités touristiques pour attirer du monde et les clients des hôtels 5 étoiles ne sortent pas beaucoup, ce qui n’encourage pas l’économie locale. »

Marilyn Monroe
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