En juillet 2023, ils se rencontraient lors de la Semaine de la gastronomie durable. Thomas Collomb, étoile verte Michelin et parrain de l’événement, s’était dit impressionné par Aviraj Pareeague chef au Heritage Le Telfair. Avec 22 ans de métier, une médaille d’or au Young Chef Challenge en 2008 et, désormais, le prix du meilleur menu de gala ainsi que celui du meilleur plat (dîner), Aviraj aura eu le privilège de vivre une semaine d’immersion dans le restaurant étoilé de Thomas Collomb. Pour Presence, les deux chefs racontent la passion pour la gastronomie durable qui les lie.
Selon vous, quels sont les aspects-clés de la gastronomie durable ?
T.C : L'approvisionnement local.
En privilégiant les produits bio, dans la mesure du possible ! Et la réduction des déchets grâce au compostage – tous nos déchets verts sont transformés en terreau.
Enfin, la pratique du tri sélectif et l’utilisation des produits de manière responsable.
A.P : Le fait que la préparation des aliments puisse se faire en évitant le gaspillage des ressources naturelles. C’est un pas dans la bonne direction pour lutter contre la faim dans le monde et faire en sorte que la nourriture soit encore disponible pour les générations futures.
Des produits ou ingrédients que vous affectionnez particulièrement ?
T.C : Je ne favorise pas un produit plus qu’un autre. Tant que tout
est local !
A.P : J'aime les produits typiques comme le fruit à pain, qui se cuisinent de différentes manières. Au four, à la vapeur, bouilli, frit, au micro-ondes, grillé, au barbecue, etc.; il peut même être transformé en pain ou pâtisserie sans gluten.
Quelles sont les principales valeurs qui guident votre cuisine ?
A.P : Favoriser les produits locaux permet une meilleure maîtrise des coûts, mais aussi des goûts.
J’aime valoriser les produits tels
qu’ils sont, sans trop les transformer, pour conserver leur simplicité et
leur fraîcheur.
T.C : Aujourd’hui, la gastronomie a le devoir de réduire au maximum son impact sur l’environnement.
Le monde gastronomique doit promouvoir le terroir et les traditions locales, même les plus modestes.
Un moment fort pendant la Semaine de la gastronomie durable à Heritage Resorts ?
T.C : Sans hésiter, la visite du potager du Château de Bel Ombre.
Je vais d’ailleurs prochainement planter les graines qui m’ont été offertes par le jardinier en chef du Château.
A.P : La présence du chef Thomas Collomb, bien sûr. Il nous a beaucoup apporté, par sa cuisine française exquise et sa passion pour le développement durable. L’occasion de perfectionner nos compétences, d’expérimenter de nouveaux ingrédients et de repousser les limites en matière de cuisine durable.
Pouvez-vous nous donner des exemples de techniques innovantes que vous avez développées ou perfectionnées ?
T.C : Nous essayons au maximum
de valoriser les surplus alimentaires. Par exemple, nous confectionnons des carrot cakes à partir des épluchures de carottes. Nous transformons aussi la pulpe de légumes centrifugés en une poudre précieuse pour ses arômes.
A.P : Des techniques de conservation d’aliments comme la fermentation ou la congélation. Leur durée de vie sera prolongée et ils seront tout aussi délicieux ! Il y a aussi la transformation des fruits mûrs en confitures et des légumes en potages.
Pourquoi encourager les gens à opter pour une gastronomie durable ?
A.P : Parce qu’il est temps de prendre soin de nous. La gastronomie durable est d’ailleurs née de cette vocation : prendre soin des agriculteurs, prendre soin de nos proches, prendre soin de notre santé et de celle de notre planète.
T.C : Nous nous engageons tous les jours auprès de nos équipes, qui sont jeunes, pour contrôler leurs techniques et leurs déchets. Le plus important est de les sensibiliser pour que des gestes simples deviennent des automatismes car malheureusement, sans accompagnement, ils manqueront de rigueur et de respect pour l’environnement.
Comment envisagez-vous l’avenir ?
A.P : Aujourd’hui, la façon dont nous produisons des aliments compromet notre capacité à nous nourrir à l'avenir. Bon nombre des défis majeurs auxquels le monde est confronté sont liés à la production alimentaire, notamment le changement climatique, la pénurie d’eau et la déforestation. Transformer la façon dont les aliments sont produits à Maurice pourrait contribuer à lutter contre le changement climatique et à accélérer les progrès vers la réalisation des objectifs de développement durable.
T.C : Je pense et j’espère que dans quelques années, ce que l’on appelle aujourd’hui « gastronomie durable » sera simplement le mode de fonctionnement de tous.
C’est juste une cuisine logique et pleine de bon sens.
Photos par Marianne Louge, Meilleur Ouvrier de France dans la catégorie ‘Art Photography’ et invitée spéciale pour la Semaine de la Gastronomie Durable 2023.